Conception et réalisation originale : Cécile Pérez et Julien Lot, puis Lionel Disez
Chant, musique, jeu : Aurélie Désert, Marion Claux, Denis Lemoigne, Julien Lot
Direction artistique : Julien Lot
Accompagnement artistique, regards : Sylvie Reboulet et Léa Cornetti
Arrangements et montages sonores : Denis Lemoigne, Julien Lot
Régie son, lumière et plateau : Denis Lemoigne
Aide costumes et couture : Julie Biard et Pénélope
La grosse commission a vu le jour en mai 2015 à Créon (33) dans le cadre d'une carte blanche qui nous a été confiée par l'association Larural, organisatrice du festival Le Chapitoscope.
Nous avons alors saisi la balle au bond car, au delà de notre envie de nous amuser et de pousser la chansonnette a capela, chacun de nous avait l'engagement et l'expérience des actions théâtrales de proximité en espace public.
Pour faire jeu égal avec nos futurs usagers de toilettes sèches dans un moment aussi incongru, nous avons adopté une posture tout aussi organique que la leur en mettant en jeu nos cordes vocales ; à nue, intime, musicale et vecteur d'émotion, la voix permet de toucher de manière sensible. « Faisons de la musique d’ascenseur aux toilettes, vocale et live, qui apporte du bien-être à nos chieurs ! ».
Cerise sur le gâteau, la musique couvre très bien les bruits intempestifs...
Au final, si l'objectif de décontracter l'usager est vite apparu discutable (essayez, vous, de faire en toute sérénité avec deux guignols déguisés en pingouins qui chantent juste devant votre porte...), peu importe, il s'est révélé comme véritable moteur de jeu pour nos personnages !
Bref, la mission a bel et bien été remplie : en plus d'avoir proposé au festivalier de porter un regard différent sur les toilettes, nous avons pu créer ces espaces de rencontre à l'endroit de l'intimité de chacun. Tout en la dédramatisant et en y apportant le plus grand des respects, nous l'avons mise en exposition. En outre, par l'engouement et les questionnements qu'elle a suscités chez les usagers, les spectateurs et les organisateurs, cette première sortie a largement surpassé nos propres réflexions et fait émerger d'autres questions profondes, qui nous encouragent à creuser et à poursuivre l'aventure :
* Comment mettre en scène l'intime sans tomber dans la facilité, le voyeurisme et la vulgarité, à l'heure du tout-connecté-chronique, de la pornographie à portée de clic, de la télésurveillance à tous les coins de vie, et de la télé-réalité tapageuse ?
* Comment, de manière artistique et ludique, sensibiliser à l'écologie et, plus précisément, à la transformation organique et au gaspillage d'eau potable dans notre société où la majorité préfère aveuglément refermer le couvercle sur la lunette de ses rejets ? Comment, , amener le public à l'idée que nos matières organiques sont des ressources actives, à l'heure où, malgré la sensibilisation globale et bien-pensante à l'écologie, nous en sommes plus à consommer qu'à recycler ?
* Comment redonner ses lettres de noblesse à ce moment devenu tabou, à cet endroit rendu secret et sacré où nous assouvissons simplement un besoin primaire, tant y cohabitent le sentiment de honte, le doute, l'angoisse, la joie, la douleur et le plaisir, les notions de bien et de mal ?
Nous avons voulu donner à La grosse commission une forme d’installation située à la frontière de l'entre-sort et du spectacle. Forme qui a pour ressort l'interactivité avec le spectateur-usager qui façonne la proposition : nous ne faisons que répondre à ses besoins. Officiellement...
En terme théâtral, nous jouons sur le fil entre fiction et réalité, traitant d’un vrai sujet qui nous intéresse dans une proposition artistique saugrenue et cocasse, avec des personnages soi-disant spécialistes es bien-être et écologie.
Nous jouons en conscience du fait que, si notre action première est musicale et destinée à une seule personne qui nous écoute depuis un cabinet, nous sommes également regardés par une foule de curieux rassemblée autour de notre espace.
Nous fondons notre action théâtrale sur le choix maladroit de nos personnages en terme de dispositif : chanter devant des toilettes publiques ne sied pas vraiment au besoin d’intimité des
usagers. En conséquence, la crispation s’invite en lieu et place de la décontraction escomptée.
Notre scénographie soignée, nos costumes distingués et les délicates manières de nos personnages se réfèrent aux salons de coiffure chics et autres instituts de beauté dans lesquels le service est roi et les clients traités de manière singulière et discrète. A l'instar du secret médical, la confidentialité est de rigueur.
Notre implantation en extérieur est pour nous essentielle ; l'espace public, sauvage, génère son propre contraste qui met l'intime en lumière pour si peu qu'il y soit donné à voir.
Voilà comment La Grosse Commission propose d'autres points de vue, spectaculaire, psychologique, sociologique et écologique, sur les sujets de l’intime, de l’écoute et des déchets...